Les Sucreries de Villeneuve-sur-Verberie
Sucrerie de Noël-Saint-Martin : 1810 – 1829. Duvivier Jacques Fabrique de sucre de betteraves. Trois plans.
Sucrerie du Theil : 1876 – 1893. Quarez et Cie. Fabrique de sucre. Deux plans.
Historique
Il y eut deux établissements de ce genre dans cette commune.
Un premier créé en 1829/1830 par Charles Marie Dominique Chapelain, baron de Séréville, commune de La Bélliot, dans l’Yonne et Jacques Claude Duvivier, propriétaire et cultivateur demeurant au Murgé ou Murguet, commune de Verberie. Implantée au hameau de Noël-Saint-Martin, l’usine était mue par une pompe à feu (huit chevaux, quatre atmosphères). L’entreprise fut jugée avantageuse à toute la classe ouvrière comme devant contribuer efficacement à la prospérité des habitants. Sa fermeture daterait de 1837/1838.
Extrait d’une note adressée à la préfecture de l’Oise par le ss préfet de Senlis (06 novembre 1835) :
« La fabrique de sucre de betteraves de Madame veuve Duvivier, située au hameau de Noël-Saint-Martin, commune de Villeneuve-sur-Verberie est la seule qui existe dans mon ressort. Elle a occupé en 1834 : 47 ouvriers savoir, 20 hommes à 1,40 f par jour, 15 femmes à 65 cts, 12 enfants à 50 cts. Le travail de la récolte de cet exercice a produit : 75 000 livres en sucre brut et 35 000 en mélasse. La récolte de betteraves en 1835 paraît avoir été assez abondante, car Mme Duvivier compte sur une fabrication de 140 000 livres de sucre et occuper 120 ouvriers tant hommes que femmes et enfants ».
Une seconde (cliché ci-dessus) plus tardive lui succède, implantée au lieudit « Le Theil« . Une demande datée de 1893 porte sur l’autorisation de « continuer l’exploitation de la fabrique », ce qu’ils font depuis 1856 (Fermeture en 1914 & 1919).
Un plan, situe l’établissement entre les communes de Verberie et Villeneuve, au bord de la nationale 32 et près du carrefour entre cette route et le chemin de Noël-Saint-Martin, plus chemin vicinal n° 18. Les maisons du gérant, du concierge, du mécanicien et du basculeur se trouvent à droite, le long de la route allant à Verberie, celle du comptable de l’autre côté.
Si cette dernière a disparu, deux d’entre elles subsistent, à gauche de l’ancienne fabrique, ainsi que la maison patronale, flanquée d’un petit bâtiment en bordure de route.
Lors de ma première visite (2009), le site était occupé par l’entreprise Guimard.
A l’intérieur de l’enclos, se dressait une bâtisse en brique, toute en longueur et percée d’ouvertures en arcades, avec une partie surélevée à gauche, qui faisait penser à une distillerie. A droite, dans le prolongement, une construction plus récente servait d’atelier à l’entreprise. Selon les personnes présentes, cette partie du bâtiment originel fut détruite par un incendie.
Aperçu des pièces consultables aux archives départementales de l'Oise (Villeneuve-sur-Verberie, MP 257)
Treize documents volants et un dossier.
Le tout date de 1829/1830.
Le dossier émane de la préfecture.
Objet : fabrique de sucre de bette-raves (sic) mue par une pompe à feu (huit chevaux, quatre atmosphères).
La demande est formée par MM Charles Marie Dominique Chapelain, baron de Sereville et Jacques Claude Duvivier. L’implantation : Noël-Saint-Martin, section de la commune de Villeneuve-sur-Verberie. L’enquête commodo incommodo s’est conclue par un PV en date du 23 août précédant. Certificat délivré par le sieur Carillon, ingénieur mécanicien demeurant à Paris rue Popincourt n° 50, du trente et un du même mois. Celui du premier septembre courant délivré par le maire de la commune.
« Considérant que l’établissement de la fabrique dont il s’agit sera très avantageux à la commune de Villeneuve, parce que les indigens et les ouvriers du pays et des communes environnantes y trouveront du travail et des moyens d’existence. Qu’il sera aussi une stimulation pour la culture. Que placé en un lieu écarté de toutes habitations et sur les propriétés mêmes de Monsieur Duvivier, il ne peut en résulter ni danger pour la sûreté publique, ni aucune incommodité pour personne. N’a donné lieu à aucune opposition ni réclamation ».
Extrait du rapport du maire, s’appuyant sur l’analyse du charron de la commune :
« la fabrique projetée ne peut être qu’avantageuse à toute la classe ouvrière et ne pouvait nuire à personne et doit contribuer efficacement à la prospérité des habitants ».
Premier plan très intéressant car il montre en coupe, le bâtiment destiné à la fabrication, la cheminée et ses soubassements.
Le deuxième plan donne la distribution des locaux et leur affectation.
En haut à droite, lavoir des betteraves, puis râpes, presses, etc. puis machines à vapeur et leur atelier pour l’entretien des machines, à gauche, les filtres.
La cheminée est accolée au mur du haut.
Le troisième est le plan aquarellé du hameau et la situation de la ferme ou sera implantée la sucrerie.
Les propriétés colorées en jaune appartiennent à Monsieur Duvivier ainsi que les bâtiments en « A » et ceux en « B » ou le projet de la fabrique est indiqué en jaune et éloignée des bâtiments « A » de soixante mètres. Donc placé entre le chemin de Noël-Saint-Martin au Murgé et le chemin de Saintines et Verberie.
La grande voie qui mène de l’église à la route de Paris à Compiègne est nommée dans sa partie commune avec celle du village, chemin de Noël-Saint-Martin à Raray.
Le plan n’est pas daté, ni orienté ; la demande d’installation non plus, mais tous les documents suivants sont du deuxième semestre de l’année 1829.
Le 25 07 1829, le sous-préfet de Senlis dit que Monsieur Duvivier doit faire incessamment sa demande.
Cette sucrerie se trouvait au Theil.
Une demande datée de 1893 porte sur l’autorisation de « continuer l’exploitation de la fabrique » ce qu’ils font depuis 1856.
Un premier plan (petit format) sur papier semi transparent, situe l’établissement (important en surface) entre les communes de Verberie et Villeneuve.
Le deuxième plan (21×50 ?) montre la distribution des ateliers.
Un dossier consacré à la « sucrerie de MM. Quarez fils et Cie » évoque l’explosion d’une chaudière à vapeur, ayant fait deux victimes.
A l’intérieur, il est dit que « le drame se serait produit le deux janvier 1877. La responsabilité en incombe à l’un des trois ouvriers, employés au service des chaudières qui, en quittant son poste, a laissé une clef sur le flotteur, qui empêchait le fonctionnement et laissait croire que l’eau était à un niveau convenable dans la chaudière. Trois mois d’emprisonnement et 25 francs d’amende pour homicide involontaire. »
Mais rien ne permet d’affirmer que les deux sinistres soient liés.
Actualité du site du Theil
« Passant devant le site, en me rendant à Senlis en novembre 2011, je constate que des travaux de démolition ont commencé et qu’une partie non négligeable des bâtiments de fabrication anciens ont disparu, pour laisser place à des gravats en attente d’évacuation. L’ensemble des constructions est-il appelé à disparaître ? Ou bien s’agit-il simplement d’un réaménagement ? Des pans de murs avec arcades ont été étayés, ce qui laisse supposer qu’ils seront préservés; espérons le.
Les vestiges conséquents de sucreries anciennes dans l’Oise étant de plus en plus rares (on peut les compter sur les doigts de la main), il est un peu triste d’en voir disparaître encore.
J’avais réalisé une série de clichés, lors de mon premier passage (Août 2011), ce dont je me félicite avec le recul. En voici quelques autres pris récemment ( Novembre 2011), pour compléter le tableau.
Il est à redouter qu’hormis Francières, les autres sites encore préservés ne subissent le même sort (La Neuvilleroy, Crèvecœur-le-Grand, Trumilly-Beaurain). Et qu’en est-il des départements voisins ? Il est donc urgent d’en garder une trace photographique.
Nous invitons nos lecteurs à se saisir de leurs appareils, s’ils se trouvent en présence de vestiges de bâtiments industriels anciens (et à nous les communiquer S.V.P.). C’est grâce à ce réflexe que l’association dispose aujourd’hui d’une série de photographies, sur la sucrerie de Froyères par exemple, réalisées in extremis, avant la destruction quasi-totale. »
Joël Hiquebrant